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Ecole du spectateur : une année de découverte du patrimoine cinématographique !

Au terme d’une année où les élèves ont été encouragés à être des spectateurs actifs lors des trois séances de projection dans une salle de cinéma art et essai en partenariat avec l’Espace Magnan et Cinémas du sud, ils apparaissent plus inspirés et créatifs que jamais…

En véritables critiques cinématographiques, rien n’a échappé au prisme de leur réflexion (scénario, angles et prises de vue, images, musiques, point de vue des réalisateurs, engagement féministe et/ou psychanalytique). Un bonheur ! Laissons-leur la plume pour une critique collective du film « Alien » de R.Scott…
« C’est une créature biomécanique effrayante, se mêlant avec le décor (Lola, 1S3) ; partout et nulle part à la fois (Valentin, 1S3). Son apparence biomécanique laisse penser qu’elle se nourrit des pièces du vaisseau ! (Shannon, 1S3). La créature se situe entre l’Homme et la Machine et ne se rapproche d’aucun des deux (Axel, 1S3). L’Alien grandit telle une peur. Anecdotique au début, puis la laissant s’étendre, elle finit par devenir grande et insurmontable, nous rongeant et nous tuant (Elsa, 1S3). Cette description est là pour repousser les spectateurs mais moi j’y vois une fascination ! (Gabriel, 1S3). Alien parvient à faire intervenir l’extraordinaire dans l’ordinaire (Pierre, 1S2). C’est cette normalité qui génère l’horreur chez le spectateur (Antoine, 1S3). Il s’agit d’une bonne recette pour ce qui est de servir le côté horrifique du film ! (Armand, 1S2). La particularité de naissance et de développement des aliens est qu’ils vivent au début dans un autre être vivant : la créature et l’homme (Rémi, 1S2). Pendant toute sa croissance, l’Alien dépend de sa proie, et cet aspect parasite est fort désagréable pour le spectateur qui s’imagine subir le même sort (Eugénie, 1S3). Les apparitions de l’Alien sont soulignées et anticipées par la musique (Mattéo, 1S2). Cela s’accompagne de thèmes angoissants avec des basses reproduisant les battements de cœur qui sonnent comme la mort (Rémy, 1S3). Certaines sonorités ressemblent à des bruits corporels, les percussions semblent étouffées, enfermées dans la chair (Cassandra, 1S3).
L’Alien est comme un vin, il change vite et s’adapte à son environnement (Lucie, 1S3) qu’il soit mort ou vivant, sa présence représente toujours un danger pour l’humain (Flavie, 1S3). Il est l’élément central du film : toutes les émotions et toutes les actions sont dues à l’Alien (Jimmy, 1S2). Il est très érotisé par sa forme (Farah, 1S3) ; lorsque Ripley rencontre l’Alien, elle a l’impression d’avoir dévoilé son intimité, son corps (Chloé, 1S3). C’est une scène de tentation pour l’Alien, pris d’un désir indomptable il se jette sur elle, Ripley gagne cet affrontement et s’impose en tant que femme forte (Floriane, 1S3). Elle représente la puissance féministe et la charge érotique de cette scène de dénouement du film (Camille, 1S2). Lorsqu’elle l’expulse dans l’espace, j’y vois son émancipation en tant que femme libérée (Orso, 1S3). Ripley peut aussi se présenter comme une mère car elle ne veut pas réveiller l’Alien qui dort et pour cela elle lui chante une berceuse et tente de faire le moins de bruit possible (Thomas, 1S3). J’ai été personnellement très surprise de l’apparence de l’Alien lorsqu’il est éjecté du Nostromo, j’ai vu comme une silhouette humaine essayer en vain de s’agripper au vaisseau ! (Charlotte, 1S3). Des scènes cultes !!! (Ion, 1S2). »
Les élèves ont donc vu et été sensibles aux choix de mise en scène très différents des trois films étudiés : « My sweet pepper land », « Alien », « Sans toit ni loi ». Comme l’a précisé Pascal Génot lors de son intervention autour de ces trois films : « Le jeu d’acteur est quoi qu’il arrive empreint de codes et nous, spectateurs, sommes imprégnés de cela ! ». Pour le film Alien, les codes sont hérités du jeu « américain », actor’s studio, école moderne de l’expressivité. Dans My sweet pepper land, H.Saleem a privilégié une réalisation plus classique (décors, récit, jeu des acteurs), le spectateur est « pris » dans l’histoire, il est guidé par ses émotions, il n’y a plus de mise à distance. « Le but est de faire tomber le quatrième mur. » P.Génot. Enfin dans Sans toit ni loi, film culte des années 80 de la réalisatrice A.Varda, récemment disparue, les codes dits classiques sont rompus. Le spectateur est confronté à un objet artistique inhabituel qui a pour but de faire réagir et confronter à ses propres émotions. A noter, l’excellente participation des élèves de la classe de 1S1 lors de l’intervention de Pascal Génot !

« Être spectateur c’est « s’engager à prendre intimement position », réagir en tant que citoyen, faire partie intégrante d’un groupe. Être rendu à notre propre liberté individuelle, curieusement nous dérange beaucoup aujourd’hui… » P.Génot
Chacun à leur façon, ces trois films prouvent l’immense diversité du Cinéma tant d’un point de vue des sujets abordés que des choix de réalisation et cela fait partie intégrante d’une posture non seulement de spectateur dans les salles obscures mais de spectateur du monde !